Dans le grand sud chilien, la Patagonie offre des forêts pluviales et des champs de glace, des steppes nues et des glaciers géants, des villages oubliés au fond des fjords. Elle offre aussi des mythes de bout du monde : Détroit de Magellan, Terre de Feu, Cap Horn… autant de noms qui font rêver. On y respire l’air pur dans des paysages immenses.
“En Patagonie, celui qui se dépêche perd son temps…”, dit une expression chilienne. La devise pourrait s’appliquer au pays tout entier.
Ainsi nous vous proposons de prendre le temps chilien et explorer cette bande de terre longiligne courant du nord au sud, du désert d’Atacama à la Terre de Feu, sur plus de 4 000 kilomètres.
Parc national Torres del Paine et les cimes de la Patagonie Chilienne
Entre cordillère des Andes et steppe de Patagonie, le parc national Torres del Paine est une succession de plaines pourpres et de montagnes acérées, de vallées et de monts granitiques, de lacs laiteux et de glaciers.
Il tient son nom de ses trois aiguilles de granit « les torres », situées dans la plaine de Paine. Elles font partie de la cordillère del Paine, dont la formation remonte à plusieurs millions d’années. Une partie seulement de la Cordillère s’élève dans le parc naturel de Torres del Paine, créé en 1958 et couvrant environ 240 000 hectares.
Le mirador Base Torres est le premier des sites incontournables du parc, un point de vue imprenable sur ses trois emblématiques aiguilles qui se dressent au-dessus d’un lagon de couleur émeraude. Le Massif des Cuernos est reconnaissable à la couleur noire de ses sommets, qui contraste avec la roche claire de sa base. Et sur le lac Grey, les parois bleutées des icebergs aux reflets changeants, et le glacier Grey qui s’élève majestueusement à l’autre bout du lac : un véritable éblouissement, la beauté à l’état brut.
Le panorama y est sauvage, la présence humaine moins réelle, la nature est souveraine. Les lignes dessinées par les caprices de la nature sont aussi celles d’un Chili poétique, celui de Pablo Neruda ou de Luis Sepúlveda… Récit d’une fugue dans ce “Monde du bout du monde”.
La steppe patagonienne
Cette terre est marbrée de lacs et lagunes formées par l’érosion, qui rappellent en couleurs qu’il y a 12 000 ans, les glaciers couvraient toute la région. Ici, quelques guanacos (camélidés sauvages apparentés au lama) s’y déplacent, rapidement suivis par leurs petits.
L’herbe s’avance et danse sur une lagune, un sommet enneigé se détache de l’horizon et dévoile, sous une fine couche de nuages, des arbres rougis par l’automne. Partout, le silence règne comme un écho aux paroles de Luis Sepúlveda dans le récit de ses aventures patagoniennes, Dernières nouvelles du Sud : “La steppe patagonienne invite les humains au silence car la voix puissante du vent raconte toujours d’où il vient.” Dans le même silence, les gauchos chiliens, que l’on rencontre le lendemain, s’affairent et équipent les chevaux de l’estancia. Entre deux gestes précis et élégants, ils évoquent leur vie de baqueanos, la proximité des éléments, leur rudesse aussi.
Avenue des glaciers
Mer de glace. Avenue des glaciers, cordillère Darwin… tant de noms qui nous inspirent.
Dédales de canaux et de fjords émeraude, aux confins du monde. Les flancs bleutés des glaciers sont éclairés par le soleil, ciel bleu éclatant, et l’instant d’après, parfois masqués par un voile de pluie. Le vent souffle en rafales. Le glacier Aguilla apparaît comme accroché à la roche, suspendu au-dessus d’une lagune – son nom signifie « aigle » en espagnol, et c’est vrai qu’il semble voler au-dessus des eaux. Il ne faut pas moins que le passage d’une foule de pingouins de Magellan joueurs pour arracher le visiteur à sa contemplation.
Cap Horn
Archipel de la Terre de Feu. Au bout du bout du monde, l’île d’Horn. 55°56’ Sud et 67°19' Ouest. Dernière escale avant l’Antarctique, 950 kilomètres plus au sud. Fracas assourdissant du vent, herbes folles couchées et, au bout du sentier de planches, un imposant albatros d’acier en mémoire des 800 navires qui ont échoué le long de cette côte tourmentée. Derrière, la falaise sévère du Horn et, au loin, une immense étendue d’eau qui semble ne jamais finir.